Récemment, j’ai été témoin dans la consternation, d’une altercation entre un blanc et un autre passager ghanéen dans la cabine de première classe d’un avion, « plaidant » pour un siège. Quel est le problème avec vous les Africains? Tout ce que vous faites est de supplier, mendier, quémander pour tout! Vous pouvez demander tout ce que vous voulez, je ne vais pas vous donner mon siège. La colère s’est finalement dissipée, et l’avion décolla.

Malheureusement, j’étais assis à côté de ce blanc qui, il y a quelques minutes, venait d’insulter toute ma race. N’ayant rien d’autre à faire, je me retournai et lui demandai : «Quel était le problème tout à l’heure?’’ Apparemment, le Ghanéen voyageait avec son épouse; ils étaient assis en 1ère classe mais dans des rangées séparées. Il avait donc demandé au blanc d’échanger de siège afin d’être plus proche de son épouse. Le Blanc avait refusé, mais le Ghanéen insistait avec de nombreux « Je vous en prie »; ce qui finalement rendit le blanc furieux. « Alors, qu’est-ce que cela vous aurait coûté d’échanger votre siège »? Lui ai-je demandé. Sa réponse qui est l’essence de cet article, était ceci :
« J’ai réservé mon vol à la dernière minute, et j’ai obtenu le dernier siège disponible en 1ère classe, celui-ci. Cela signifie qu’il était également disponible pour ce monsieur, si seulement il avait demandé à s’asseoir près de sa femme quand il achetait son billet. Il ne l’a pas fait, mais il vient maintenant « supplier » pour ce à quoi il avait droit en premier lieu ».
« Cela ne devrait pas pour autant vous mettre dans tous vos états », lui dis-je.
Il répondit : « Vous pourriez avoir raison; mais malheureusement, je viens de terminer un mois de longues négociations avec vos ministres et des hauts fonctionnaires de votre gouvernement sur ce que je considère comme dons de Dieu qui sont vos droits miniers, et ce que mon entreprise d’extraction d’or devrait payer. Je viens dans votre pays ; voir toute cette pauvreté partout, avec des richesses justes sous vos pieds. Votre propre gouvernement donne aux entreprises étrangères le droit de violer et voler votre pays à votre insu. Pour quelques milliers de dollars, vos fonctionnaires permettent aux entreprises étrangères de s’en tirer avec :
(a) des exonérations fiscales perpétuelles,
(b) des franchises d’importation,
(c) des coûts d’investissement et de capital d’exploitation gonflés ou surévalués,
(d) des productions minières non déclarées,
(e) des maigres salaires pour les employés locaux faisant la majorité du travail, mais des salaires exorbitants et des comptes de dépenses substantiellement élevés pour les étrangers qui ne font presque rien,
(f) des coûts exagérés de bâtiments scolaires de mauvaise qualité et des forages de puits, au lieu de ristournes significatives ou conséquentes pour les propriétaires fonciers locaux et les collectivités;
(g) la destruction des terres agricoles avec des compensations de relocalisation pitoyables,
h) de la pollution de l’eau potable de la région,
(i) la destruction des infrastructures locales, etc.
Mes patrons m’avaient conseillé au cours d’un briefing avant mon départ. II m’avait été demandé de lire le livre de Osagyefo intitulé « néo-colonialisme. » Alors on me dit: « Soyez prêts, et le premier, à offrir à l’équipe de négociation » :
(a) quelques milliers de dollars chacun;
(b) un centre culturel, ou un bâtiment d’école de 6 classes, ou quelques puits pour la communauté, et il n’y aura pas mention de l’habituelle redevance de 10%, ou un contrôle réel du gouvernement de nos opérations, ou de compensations adéquates pour relocalisation, etc.
Je ne croyais pas en ce que disaient mes patrons, étant donné qu’un simple bachelier comme moi, venait traiter avec des fonctionnaires titulaires de maîtrises et de doctorats.
Imaginez ma surprise et ma déception quand ces fonctionnaires, au lieu d’exiger ce qui est reconnu et courant comme compensations et redevances acceptables au le plan international pour leur pays et ses collectivités, ont accepté la ristourne de 3%, et avec toutes sortes de cadeaux, et plus tard sont venus me supplier de déposer ‘‘quelque chose’’ dans leurs comptes à l’étranger (en écrivant leurs numéros sur des bouts de papier). Je ne voulais plus entendre la phrase ‘‘Je vous en prie » de nouveau.’’
L’ironie ici, est que ces soi-disant personnes éduquées et instruites, après avoir offert gratuitement les richesses de leur pays, et m’avoir supplié de déposer «quelque chose» dans les banques étrangères, se retournent pour aller emprunter leur propre argent au FMI, à la Banque Mondiale, ou aux «pays donateurs» ou «partenaires au développement ». Vous souvenez-vous du nombre de titulaires de doctorats qui ont bénéficié ou reçu des pots de vin dans l’affaire Mabey & Johnson?
Je suis étonné que vos intellectuels, ministres et présidents, qui ont étudié ou voyagé en outre-mer, n’ont toujours pas la notion qu’ « Il n’existe pas de repas gratuit. » Il n’existe pas «de pays donateurs» ou de «partenaires au développement». Les sociétés minières étrangères prennent vos minéraux pour presque rien, déposent leurs cargaisons d’argent dans des banques et puis se retournent pour prêter ce même argent à vos gouvernements, et à des conditions ridicules, en utilisant des termes tels que l’éducation de base ‘‘non subventionnée’’.
Certes, des sociétés comme Anglogold et Newmont ont contribué à notre économie, lui ai-je rétorqué.
« A quel prix? Avez-vous été à Obuasi récemment pour voir la dévastation et la destruction de cette ville qui fut auparavant belle? Newmont a une concession de plus de 740 km² à Ahafo ; qu’est-ce que Ahafo a obtenu en contrepartie des revenus annuels de plus de $750 000 000 de Newmont? Presque RIEN !! C’est exactement ce que disait votre premier président à propos du « néo-colonialisme.
 » Avez-vous lu ce livre? Me demande-t-il.
J’avais honte de répondre « non »
«Je ne vous blâme pas ; aucun de vos fonctionnaires « éduqués » assis à la table de négociation l’avait lu. Ce livre devrait être un manuel à lire absolument dans vos lycées et universités, afin que vous puissiez comprendre comment les entreprises et les gouvernements étrangers s’efforcent de vous voler aveuglément, comme dans le passé. Seulement, cette fois-ci, leurs méthodes sont enveloppées dans des « accords » à sens unique avec la complicité de vos Directeurs Généraux, ministres, et présidents «éduqués».

« Comment pouvez-vous accuser nos fonctionnaires de complicité ? », Lui ai-je demandé de manière défensive. Votre presse a-t-elle demandé pourquoi le DG de la Chambre des mines du Ghana continue de défendre les compagnies minières ; ou comment un Ghanéen, qui travaille pour une société Ghanéo-britannique au Ghana peut obtenir l’appellation ou le titre ‘ » de l’Ordre de l’Empire britannique (Sir) »?
Pouvez-vous imaginer que ces sociétés étrangères, sous les regards attentifs de représentants de votre gouvernement, payent aux indigènes 5 pesewa (GHC 0,05) pour louer leur hectare de terre concédée, après avoir emporté de cette même terre la somme de GHC 1.000.000 ?
Les grandes entreprises, Newmont et AngloGold n’ont même pas honte d’être de connivence avec vos fonctionnaires en acceptant de payer l’augmentation de redevance de 5%. Ils payent les 5% sur la base de l’ancien prix de l’or qui était de $300/once, au lieu du prix mondial courant qui est de $1500/once, privant ainsi votre peuple de $75.000.000 dans le processus.
Malheureusement, vos fonctionnaires négociants sont heureux de rire devant les banques étrangères avec leurs milliers de dollars, et dans certains cas, accompagnés par des titres de « Docteur » et de « Sir ».
Même les Chinois entrent dans ce jeu, quoique de manière illégale. Ils menacent les communautés avec des armes et la puissance de feu, et votre armée regarde de manière indifférente.
Votre presse est tout aussi mauvaise. Avec déjeuners buffet ou des dîners et un peu de cedis dans leurs poches, votre presse écrite devient la machine de propagande de ces sociétés minières. Ils vantent les forages de puits et les écoles de 6 classes, mais laissent de côté le traitement impitoyable subi par les employés et les résidents locaux, et la destruction de l’environnement. Les ondes sont muettes sur tout cela.
WACAM est la seule voix pour le peuple. Pourquoi les médias ne supportent pas WACAM en diffusant et éduquant les masses, notamment les officiels en leur faisant savoir que :
(a) L’organisation des Nations Unies n’approuve pas que les sociétés étrangères volent les indigènes en dérobant tous les avantages tirés de leurs dons de Dieu qui sont les minerais et le pétrole.
(b) Avant Rawlings, les compagnies minières étrangères au Ghana ne pouvaient pas détenir plus de 40% de participations dans les partenariats avec le gouvernement ; maintenant le gouvernement du Ghana détient zéro pour cent, alors que ces sociétés détiennent 100%, et donc ne se sentent pas dans l’obligation de devoir rendre compte à aucune autorité.
Un retour annuel sur investissement de 50% pour les 7 premières années, est généralement considéré comme excellent. Les sociétés minières et pétrolières au Ghana et dans le reste de l’Afrique, emportent perpétuellement plus de 400% de retour sur leurs investissements, sans aucune considération pour le sort des indigènes.
J’ai fait semblant de dormir, donc il a arrêté de parler. En fait, je réfléchissais sur tout ce qu’il avait dit. Je me suis rendu compte que OUI, nous disons trop «donne-moi, donne-moi », « je vous en prie», «je vous en prie », « Mon cadeau de Noël», «Donne-nous quelque chose pour l’eau ».
Je me rappelle, l’analogie de mon frère. Son chat miaulait pour de la nourriture, en général des miettes dans son bol à l’extérieur. Le bol de nourriture attirait les souris vivant dans la maison. D’aucun aurait pensé que le chat aurait sauté sur ces souries juteuses, QUE NON. Il restera couché là et regarder les souries manger toute sa nourriture, et revenir ensuite miauler pour plus de miettes. Nous observons nos fonctionnaires faire cadeau de notre pétrole, bauxite, diamant, etc., pour des maigres ristournes, pendant que nous vautrons dans la pauvreté. Il est temps de nous réveiller de notre sommeil, et de prendre ce qui est à juste titre le nôtre aux tables de négociation.
Nana Kofi
Source: Le Nouveau Courier
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