Le 18 juin 2012, la mission des tribunaux Gacaca sera terminée. C’est l’occasion de faire un bilan de leur action en faveur d’une Justice rapide, transparente et équitable.

Une solution adaptée

En trois mois, du 7 avril au 4 juillet 1994, le Génocide perpétré contre les Tutsi au Rwanda a fait plus d’un million de victimes. La violence a été exercée entre collègues, entre voisins, parfois au sein d’une même famille. Ce crime de masse a été rendu possible par une longue chaine de responsabilités, depuis le sommet de l’Etat jusqu’aux individus isolés. Les criminels ont exécuté ou torturé leurs victimes sans distinction et personne n’est sorti indemne de cette tragédie.
Au lendemain du Génocide, dans un pays dévasté et face à une population traumatisée, il a fallu rendre Justice. Mais comment traiter tous les dossiers dans une administration totalement détruite? Le nouveau gouvernement Rwandais a souhaité respecter les obligations du Droit International garantissant le Droit à une Justice équitable. Malgré l’urgence d’une situation post-crise, de l’attente des victimes et du risque de fuite des coupables, il n’a pas voulu mettre en place une Justice expéditive. Il a donc pris le temps de réfléchir à la meilleure solution pour tous.
C’est dans cet esprit que les tribunaux Gacaca ont été mis en place en 2001 pour un fonctionnement effectif en 2005. Ils procèdent d’une tradition de justice communautaire très ancrée dans la société rwandaise. Les différends sont réglés par le dialogue, soumis à l’arbitrage des Inyangamugayo, les anciens du village, et éteints par une juste réparation. Le mot Gacaca désigne d’ailleurs l’endroit où on se réunit pour délibérer. Aujourd’hui considérés comme une référence en matière de Justice Transitionnelle, les Gacaca ont reçu la mission d’établir « la vérité, la justice et la réconciliation ». C’est sur ces trois principes complémentaires qu’ils ont travaillé.

Un système efficace

Les Gacaca exercent une justice de proximité mais il ne s’agit pas d’une justice improvisée. La Loi de 2001 créant les Juridictions Gacaca a été modifiée en 2004, en 2007 et en 2008 pour mieux préciser et adapter leur organisation, leur fonctionnement et leurs compétences. Les Gacaca sont encadrés par Le Service National des Tribunaux Gacaca qui assure la supervision de leurs activités. Pour une meilleure efficacité, ils sont décentralisés au niveau de la Cellule qui couvre quelques villages.
Par ailleurs, les Gacaca suivent un code de procédure très précis. Dans chaque communauté, 9 juges sont élus sur la base de leur intégrité, conformément à la tradition. Les procès sont toujours publics et les débats sont soigneusement consignés. Les décisions interviennent en référence aux catégories de crimes et de peines précisées par la Loi régissant le processus Gacaca. La peine maximale est l’emprisonnement à perpétuité puisque la peine de mort a été abolie en 2007.
Dans les Gacaca, chacun peut se faire entendre, sur tous les sujets et sans aucune restriction, à charge ou à décharge de la personne concernée. Les victimes exposent leurs griefs et argumentent les compensations demandées. Les suspects confessent leurs actes, reconnaissent ou déclinent leur responsabilité. Les témoins interviennent librement au cours de la procédure. Chacun peut contester la décision et faire appel.
Les tribunaux Gacaca ont agi en complément des autres juridictions ayant compétences pour les grands criminels du Génocide : les Tribunaux nationaux et le Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR) mis en place dès novembre 1994 par les Nations Unies. Les 12 103 juridictions Gacaca ont mobilisé 169 442 juges et examiné 1 951 388 cas en 6 ans.
Les Gacaca ont donc permis de combattre l’impunité et de rendre justice dans un climat apaisé. Leur action a construit la réconciliation nationale et ils resteront une étape fondatrice du Rwanda moderne ■

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Posté par rwandaises.com