Alors que les deux camps durcissent leurs positions, la crise s’aggrave au Burundi et préoccupe de plus en plus les instances internationales : l’Union africaine a estimé que les conditions n’étaient pas propices à de nouvelles élections tandis que la Fédération internationale des droits de l’homme a publié un rapport très alarmiste, dénonçant le durcissement du pouvoir qui n’hésite pas à ouvrir le feu sur les manifestants et à assimiler les opposants à des « terroristes ».Par ailleurs, alors qu’il doit se pencher dans les heures qui viennent sur la crise burundaise, le Conseil de sécurité s’est vu remettre un témoignage inquiétant, qui, par certains points, rappelle l’avertissement livré à Kigali par le témoin « Jean-Pierre », en janvier 1994.Rappelons que ce dernier, qui appartenait à l’entourage du président Habyarimana et qui était en contact avec les Interahamwe, avait averti le général Dallaire, commandant des forces de l’ONU au Rwanda, des préparatifs du génocide : distribution d’armes aux miliciens, rédaction de listes de personnes à éliminer, déploiement de groupes de tueurs au service des extrémistes…Les témoignages livrés par deux informateurs burundais à un avocat belge, Me Maingain, sont de la même eau. Ces deux hommes, ayant travaillé dans les services de renseignement du Burundi et dans l’entourage du président Pierre Nkurunziza, se sont réfugiés dans un pays voisin, vraisemblablement le Rwanda.Exigeant de demeurer anonymes et craignant pour leur sécurité, ils ont livré des informations troublantes sur la stratégie déployée par le parti CNDD pour demeurer au pouvoir : selon eux, les miliciens Imbonerakure, des jeunes recrutés par les autorités locales, auraient été dotés d’armes et, dans la région de Kiriba, ils auraient établi leur jonction avec des groupes d’Interahamwe, aujourd’hui appelés FDLR (Forces démocratiques pour la libération du Rwanda) qui seraient venus du Congo voisin où ils sont pourchassés par l’armée.Ces jeunes militants auraient été chargés d’infiltrer les manifestations en cours à Bujumbura et, en menant des actions violentes (jets de grenade, incendies, provocations…)ils devraient tenter de les faire dégénérer afin de justifier une répression accrue et l’usage du qualificatif de « terroriste » dont les autorités affublent déjà les manifestants.Ces informateurs auraient révélé l’existence et l’emplacement de caches d’armes, expliqué comment fusils et munitions allaient être distribués, sur quelles bases des listes d’opposants allaient être établies.

Ces informations, transmises au Conseil de sécurité par l’avocat belge, devraient amener les représentants des pays membres à prendre la mesure du danger et surtout, à adopter des mesures dissuasives afin de ne pas répéter les erreurs commises au Rwanda en 1994 où l’indifférence de la communauté internationale avait rendu le génocide possible.

Par ailleurs, alors que des images ont montré que le président Nkurunziza, sans donner aucun signe d’inquiétude ou de nervosité, se trouvait dans le nord du pays, où on le voit chanter et danser avec des militants de son parti, la traduction du bref discours tenu à cette occasion fait froid dans le dos. S’adressant aux jeunes Imbonerakure, le chef de l’Etat aurait déclaré (selon la traduction qui nous a été donnée de ses propos) :

« … le moment fatidique est arrivé. Vous avez entendu hier ce qui a été dit par les antagonistes qui ont déclaré qu’ils allaient nous imiter en envahissant les rues. On doit donc sortir les houes que nous vous avons données, je suis sûr que vous vous êtes organisés en conséquence.

Concernant les autres armes nécessaires comme les balles et les tenues, il faut voir Gérard Ndabire. IL faut aussi garder à l’esprit que les antagonistes ne sont pas seulement ceux de la société civile et les opposants, mais aussi ceux qui étaient avec nous et qui se sont aussi levés contre nous. » (allusion aux « frondeurs » au sein du parti présidentiel, qui s’opposent au troisième mandat envisagé pour le chef de l’Etat.

Si leur véracité et leur authenticité venaient à être confirmés, ces témoignages tendraient à démontrer que le pire demeure possible au Burundi. Cette crainte d’un nouveau génocide, ou de massacres à grande échelle ne peut laisser indifférents les pays voisins, dont le Rwanda au premier chef, ni la communauté internationale placée devant ses responsabilités.


Publié le 8-05-2015 – à 23:20′ par Braeckman

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