La localisation du chef de l’Etat reste inconnue; les tractations entre les parties toujours sans succès
Le chef d’Etat-major burundais, le général Prime Niyongabo, a affirmé dans la nuit de mercredi à jeudi que la tentative de coup d’Etat contre le président Pierre Nkurunziza avait échoué, une information immédiatement démentie par le camp putschiste.
« La tentative de coup d’Etat sous la conduite du général major Godefroid Niyombare a été déjouée », a-t-il déclarée dans une allocution à la radio nationale, revendiquant le contrôle de la présidence de la République et le palais présidentiel.
« La Force de défense nationale appelle les mutins à se rendre », a-t-il ajouté sur les ondes de la radio, restée sous le contrôle des militaires loyalistes à Pierre Nkurunziza depuis l’annonce de sa destitution par le général Niyombare mercredi après-midi.
Le porte-parole des putschistes, le commissaire de police Vénon Ndabaneze, a balayé ces déclarations, soulignant que son camp avait le contrôle de l’aéroport.
« Le message du chef d’Etat-major Prime Niyonganbo ne nous surprend pas parce qu’il s’est rallié aux forces du mal depuis longtemps et au mensonge », a-t-il dit à l’AFP.
« Ce soir, un avion qui était attendu n’a pas atterri à l’aéroport de Bujumbura qui est sous notre contrôle », a-t-il ajouté, en référence à l’avion transportant Pierre Nkurunziza, qui se trouvait mercredi en Tanzanie pour un sommet régional consacré à la crise déclenchée au Burundi par l’annonce de sa candidature à un troisième mandat lors de la présidentielle de juin.
Selon Vénon Ndabaneze, la présidence et la radio nationale sont restées sous le contrôle des loyalistes parce que le camp putschiste avait voulu éviter l’effusion de sang.
« Aujourd’hui, on n’a pas voulu faire d’effusion de sang, mais s’il nous pousse à utiliser des moyens qui nous obligent à verser le sang, il en répondra devant la loi », a-t-il lancé, reconnaissant toutefois aussi que son camp ne contrôlait pas tout: Il y a des gens qui sont encore de mèche avec le président.
Tractations
Plus tôt, un haut gradé loyaliste a affirmé à l’AFP que des « tractations » étaient en cours entre loyalistes et putschistes. Les deux camps sont « d’accord pour ne pas verser le sang des Burundais », a-t-il assuré.
« Dans les deux camps, on est décidé à trouver un compromis avant l’aube pour pouvoir l’annoncer à la population pour éviter la confusion et que les choses ne dégénèrent demain », a souligné un officier.
En fin d’après-midi, la présidence tanzanienne avait affirmé que le président Nkurunziza avait quitté la capitale économique tanzanienne Dar es Salaam pour Bujumbura.
Toute la soirée, des rumeurs ont circulé sur la localisation du chef de l’Etat burundais.
Des responsables ougandais ont refusé de confirmer ou de démentir une possible arrivée du président Nkurunziza en Ouganda. Une source au sein de l’opposition burundaise, présent à Dar es Salaam, a de son côté affirmé avoir vu revenir à leur hôtel les membres de sa délégation, qui lui auraient expliqué ne pas avoir pu atterrir en Ouganda.
Pierre Nkurunziza avait atterri dans la matinée à Dar es Salaam pour un sommet extraordinaire des chefs d’Etat de la Communauté est-africaine (Burundi, Kenya, Ouganda, Rwanda, Tanzanie).
Ses homologues de la région, qui ont discuté sans lui de la situation dans son pays, ont condamné le coup d’Etat en cours. Et demandé le report des législatives prévues le 26 mai et de la présidentielle du 26 juin, estimant que « les conditions n’étaient pas propices à des élections.
Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a exhorté « au calme et à la retenue », et la Maison Blanche a appelé toutes les parties à « déposer les armes ».
Du côté de la présidence burundaise, le principal conseiller en communication de M. Nkurunziza, Willy Nyamitwe, a affirmé que les militaires putschistes étaient « recherchés » pour être « traduits en justice ».
Les locaux de la radio-télévision sont restés sous contrôle des loyalistes, qui ont fait face dans la journée à des milliers de manifestants. Selon la Croix-Rouge burundaise, des affrontements entre manifestants et policiers ayant eu lieu avant l’annonce du coup d’Etat ont fait 3 morts, 2 civils et 1 policier, et 66 blessés.
– Ancien compagnon d’armes –
La tentative de coup d’Etat est menée par un compagnon d’armes du chef de l’Etat au sein de l’ex-rébellion hutu, le Cndd-FDD, devenu le parti au pouvoir depuis la fin de la longue guerre civile (1993-2006) entre la majorité hutu et la minorité tutsi, longtemps dominante dans l’armée.
« Le président Pierre Nkurunziza est destitué de ses fonctions, le gouvernement est dissous », a annoncé mercredi après-midi sur une radio privée le général Godefroid Niyombare, un Hutu.
Plus tard, il a accusé le chef de l’Etat d’avoir présenté sa candidature « au mépris du peuple burundais ».
Le général Niyombare avait été limogé de la tête des services de renseignement en février par le président après lui avoir déconseillé de briguer un troisième mandat, jugé inconstitutionnel par ses adversaires.
L’officier putschiste a annoncé la mise en place d’un « comité pour le rétablissement de la concorde nationale, temporaire », chargé de rétablir « l’unité nationale » et de reprendre le « processus électoral dans un climat serein et équitable ». Il a dit prendre la tête du comité.
Personnalité aujourd’hui respectée et considéré comme un homme de dialogue, le général Nyombare était devenu après la guerre civile chef d’état-major adjoint, puis chef d’état-major de l’armée. Nommé en décembre 2014 à la tête du Service national de renseignements (SNR), il avait été limogé trois mois plus tard.
Les opposants à un troisième mandat du président, issus pour la plupart des rangs de l’opposition et de la société civile, avaient porté mercredi matin la contestation au coeur de Bujumbura, sanctuarisé par la police depuis le début des manifestations.
Plusieurs centaines de personnes, dont beaucoup de femmes, ont réussi pour la première fois à se rassembler sur la symbolique place de l’Indépendance, au centre de la capitale.
L’impasse politique des dernières semaines a suscité une inquiétude sans cesse grandissante, alors que l’histoire récente du Burundi est jalonnée de massacres ethniques, dans une Afrique des Grands lacs toujours très instable.
(AFP)
http://www.i24news.tv/fr/actu/international/afrique/71036-150513-burundi-un-general-annonce-la-destitution-du-president-nkurunziza-a-la-radio
Posté par rwandaises.com