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Début novembre 1975, Luanda retenait son souffle : à la veille de la date fixée pour l’indépendance, alors qu’un pont aérien avait emporté les derniers colons portugais, la capitale de l’Angola était prise en étau. D’un côté, depuis le Zaïre de Mobutu, les troupes du FNLA (Front national pour la libération de l’Angola) progressaient et à Caxito elles s’étaient emparées du dernier verrou les séparant de la capitale. D’un autre côté, Jonas Savimbi et ses hommes, qui avançaient de 75 km par jour, était épaulés par l’armée sud africaine, la plus puissante de la région, qui occupait le vaste territoire du Sud Ouest africain.
A l’époque, le groupe rebelle le plus important, comportant le plus de cadres qualifiés, souvent d’origine métisse, était le MPLA (Mouvement populaire pour la libération de l’Angola) dirigé par le Dr Agostinho Neto et il avait le contrôle de la capitale. Dans leurs petits bureaux de Luanda, les dirigeants du MPLA, dont José Eduardo dos Santos, l’actuel président, qui était alors chargé des relations extérieures du parti, préparaient la célébration de l’indépendance, fixée au 15 novembre. Mais ils avaient aussi, sous leur bureau, une valise déjà bouclée, au cas où une défaite de leurs troupes les obligerait à se replier en hâte…Dos Santos, que nous avions rencontré à l’époque, n’avait cependant pas l’allure d’un homme aux abois. Il se montrait confiant et assurait que « tout pouvait encore arriver ».
De fait, le 3 novembre, le Dr Neto, voyant que ses troupes formées à la guérilla étaient incapables de faire face à une guerre de grande échelle menée en rase campagne, avait fait appel à l’aide cubaine et demandé des renforts. La réponse ne tarda guère : 48 heures plus tard, le bureau du parti communiste cubain donnait son accord à une intervention décisive. L’opération Carlota était décidée, portant le nom de Carlota Lukumi, une esclave noire qui, dans une plantation de Matanzas, avait, le 5 novembre 1843, empoigné sa machette et pris la tête d’une rébellion qui allait mener à l’indépendance de Cuba.
Le 7 novembre 1975, les 82 premiers soldats cubains, en civil et dotés d’armes légères, embarquaient sur un vol des Cuban Airlines en direction de la Guinée Bissau. Dans les jours qui suivirent, par air et par mer, des milliers de Cubains allaient être envoyés en Angola, stoppant net l’offensive du FNLA dans les faubourgs de la capitale. Fin novembre, à Ebo, huit blindés sur africains qui accompagnaient une « colonne zouloue » furent mis hors de combat, un répit qui permit l’acheminement de troupes supplémentaires venues de Cuba et d’armes envoyées par l’Union soviétique.
A cette époque, la guerre froide faisait rage et les Américains, qui avaient soutenu l’intervention sud africaine et appuyaient leur allié Mobutu, dénoncèrent une implication directe de Moscou, assurant que les Cubains n’avaient été que des « mercenaires ».
La réalité est bien différente : l’action cubaine avait été décidée par Fidel Castro en personne et s’inscrivait dans une longue histoire de solidarité avec l’Afrique, ouverte par le séjour de Che Guevara au Congo au milieu des années 60.
Par la suite, décrivant l’opération Carlota, l’écrivain Gabriel Garcia Marquez devait expliquer que Fidel Castro avait lui-même pris la tête des opérations : « il n’y avait pas un seul petit point sur la carte d’Angola qu‘il fut incapable d’identifier, pas une particularité du terrain qu’il ne connût par cœur. Il était si méticuleusement absorbé par la guerre d’Angola qu’il pouvait citer n’importe quelle statistique relative à l’Angola comme s’il se fût agi de Cuba elle-même.(…) Quand la situation était critique, Fidel Castro pouvait passer jusqu’à 14 heures d’affilée dans la pièce qui lui servait de quartier général à distance, sans manger et sans boire, comme s’il était vraiment sur le champ de bataille. Il suivait le cours des engagements avec des épingles sur des cartes détaillées, se tenant en contact avec le haut commandement du MPLA sur place. »
Fin 1975, 36.000 militaires cubains se battaient en Angola et les opérations tactiques et stratégiques étaient suivies et dirigées jour après jour par Fidel Castro en personne, renseigné par les satellites soviétiques.
Il fallut attendre 1988 pour que l’intervention cubaine fasse définitivement basculer l’histoire de l’Afrique : le 23 mars, les troupes cubaines et angolaises soutenant la SWAPO, le mouvement de libération de la Namibie, stoppèrent une avancée sud africaine à Cuito Canavale dans le sud de l’Angola. Cette défaite allait s’avérer fatale pour Pretoria : elle entraîna l’indépendance de la Namibie et, plus tard, la libération de Nelson Mandela et la fin progressive du régime d’apartheid qui déboucha sur les élections démocratiques de 1994.
Cuba entre-temps avait développé d’autres formes de coopération avec l’Afrique : plus de 40.000 étudiants africains avaient bénéficié de bourses d’études sur l’île tandis que des dizaines de milliers de médecins cubains ont été déployés sur le continent, combattant en première ligne un adversaire plus dangereux encore que les blindés sud africains : l’épidémie de fièvre Ebola…
Fidel Castro a aujourd’hui 90 ans: les jeunes d’Afrique savent ils encore ce qu’ils lui doivent?

http://blog.lesoir.be/colette-braeckman/2016/08/14/fidel-castro-lorsquil-changea-lhistoire-de-lafrique/

Posté le 18/08/2016 par rwandaises.com