Le rappeur franco-rwandais Gaël Faye

Il prépare un nouvel album et se retrouve dans la sélection des prix littéraires français avec un premier roman lumineux. A 34 ans, le rappeur franco-rwandais Gaël Faye connaît un succès inattendu en revisitant ses jeunes années et le pays de ses ancêtres.

Figure montante de la scène rap française, le jeune homme au physique à la Stromae jongle entre les studios et les salons du livre.

Son roman « Petit pays », paru fin août, est un des succès de la rentrée. En lice pour de prestigieux prix littéraires en France – Goncourt, Médicis et Fémina – il est déjà vendu dans dix-sept pays.

Ce roman à hauteur d’enfant conte le quotidien de Gabriel, un métis franco-rwandais qui grandit au Burundi (comme l’auteur) avant que sa vie ne se fissure avec la séparation de ses parents, la guerre civile et le génocide au Rwanda voisin, qui le contraint à l’exil en France.

Evocation d’une bande de garçons vivant au grand air, des jeux d’enfants, d’une certaine insouciance… « Tout a commencé par une sensation diffuse, celle qu’il y avait eu beaucoup de bonheur dans mon enfance », se souvient-il.

S’il écrit depuis l’âge de 13 ans, Gaël Faye a mis du temps avant de s’imaginer écrivain. Malgré « un paquet de débuts de romans dans les tiroirs », c’est vers la musique qu’il s’est d’abord tourné à la vingtaine, après un passage dans un fonds d’investissement à Londres où il menait « une vie de poisson rouge ».

L’album « Pili Pili sur un croissant au beurre » verra le jour en 2013. C’est en l’entendant à la radio qu’une éditrice le découvre et l’encourage à s’essayer au roman. Une des chansons s’intitule d’ailleurs « Petit pays ».

– Retour au Rwanda –

Résolument à la recherche de son enfance, Gaël Faye ne l’est pas que dans la littérature. Il est parti au Rwanda où il vit aujourd’hui avec femme et enfants.

« J’avais envie de renouer avec une partie de mon identité que je ne connaissais pas et que je fantasmais. J’avais envie de connaître le quotidien, pas seulement le pays du génocide » et des commémorations, explique-t-il.

S’il n’a « pas retrouvé la douceur de son enfance », il évoque un pays jeune qui a la capacité à se projeter dans le futur. « Le Rwanda a 22 ans, car 1994 (année du génocide), c’est l’année zéro. Depuis on a aboli les ethnies, il y a eu les tribunaux populaires, cela permet de croire à un projet collectif ».

Mais vivre dans un pays marqué par un génocide qui a fait 800.000 morts en trois mois, principalement parmi la population tutsie, est parfois « vertigineux », souffle-t-il. « La haine nous guette. Elle n’est jamais loin ».

« Quand on se rend compte que son voisin, qui a coupé des gens à la machette, est sorti de prison, a fait sa peine et qu’on le rencontre au café, il faut les armes de la littérature, de la philosophie » pour faire face.

Il a beaucoup lu sur le génocide et a trouvé dans la littérature des Caraïbes, haïtienne notamment, un imaginaire et un travail sur la langue qui le séduisent.

Son livre devrait être traduit en kirundi et en kinyarwanda, parlés respectivement au Burundi et au Rwanda, grâce au travail d’associations. L’idée est de distribuer le livre quasi-gratuitement pour qu’il soit lu par le plus grand nombre.

« J’aime l’idée du livre comme bouée de sauvetage. Dans les périodes sombres, quand les choses vont à vau-l’eau, j’aime l’idée qu’on s’empare des livres », poursuit celui qui a écrit son roman pendant les attentats de Paris en janvier 2015.

Sa vie risque de tourner deux-trois ans autour de « Petit pays », l’a prévenu son éditeur. Pourtant, Gaël Faye est déjà loin: outre un mini-album et une date de concert en novembre à Paris, il prépare son deuxième roman. Le sujet? Rien à voir avec l’enfance, glisse-t-il.

http://fr.africatime.com/rwanda/articles/le-franco-rwandais-gael-faye-succes-surprise-de-la-rentree-revisite-une-enfance-perdue

Posté le 23/09/2016 par rwandaises.com