Le Sénat s’est prononcé en faveur du rétablissement de l’article 38 ter de la Loi Égalité et Citoyenneté permettant de poursuivre les négationnistes des génocides – dont le génocide arménien nous dit-on – et crimes contre l’humanité tels que l’esclavage. Par Vigilance Arménienne contre le Négationnisme
Étonnamment, les commentateurs de ce vote, dont le Conseil de Coordination des organisations Arméniennes de France (CCAF), se sont focalisés sur le génocide arménien. Ils oublient de préciser que seuls seront poursuivis les négationnistes d’un crime jugé par une juridiction française ou internationale. Ils le savent pertinemment, le génocide arménien n’a jamais été jugé par ce type de juridiction. Pour les crimes qui ne pourront cocher la case « jugement français ou international », il faudra alors remplir une autre condition : « la négation, la minoration ou la banalisation de ces crimes » devront être accompagnées d' »une incitation à la violence ou à la haine ». Or, il est tout à fait possible de nier un génocide ou un crime contre l’humanité sans proférer des propos violents ou haineux. C’est même la spécialisation des négationnistes les plus pervers qui se présentent avec le masque de l’historien : ce sont les plus prolifiques, les plus influents et les plus dangereux. Ceux-là resteront certainement hors du champ d’application de la loi. Seule (grande) satisfaction : si le Conseil Constitutionnel n’invalide pas cet article avant sa promulgation, la Loi Égalité et Citoyenneté (qui – en l’occurrence – ne mérite pas son nom) donnera la possibilité de poursuivre les négationnistes du génocide des Tutsi au Rwanda en 1994, génocide qui a fait, pour sa part, l’objet d’un jugement international. Mazeltov à nos amis tutsi pour lesquels le CCAF a travaillé avec abnégation et en toute discrétion… Le Collectif VAN analyse ci-dessous le vote du 14 octobre 2016 et reproduit les éléments d’information en ligne sur le site du Sénat.

Le Sénat s’est prononcé en faveur du rétablissement de l’article 38 ter de la Loi Égalité et Citoyenneté permettant de poursuivre les négationnistes des génocides – dont le génocide arménien nous dit-on – et crimes contre l’humanité tels que l’esclavage. Étonnamment, les commentateurs de ce vote, dont le Conseil de Coordination des organisations Arméniennes de France (CCAF), se sont focalisés sur le génocide arménien. Ils oublient de préciser que seuls seront poursuivis les négationnistes d’un crime jugé par une juridiction française ou internationale. Ils le savent pertinemment, le génocide arménien n’a jamais été jugé par ce type de juridiction. Pour les crimes qui ne pourront cocher la case « jugement français ou international », il faudra alors remplir une autre condition : « la négation, la minoration ou la banalisation de ces crimes » devront être accompagnées d' »une incitation à la violence ou à la haine ». Or, il est tout à fait possible de nier un génocide ou un crime contre l’humanité sans proférer des propos violents ou haineux. C’est même la spécialisation des négationnistes les plus pervers qui se présentent avec le masque de l’historien : ce sont les plus prolifiques, les plus influents et les plus dangereux. Ceux-là resteront certainement hors du champ d’application de la loi. Seule (grande) satisfaction : si le Conseil Constitutionnel n’invalide pas cet article avant sa promulgation, la Loi Égalité et Citoyenneté (qui – en l’occurrence – ne mérite pas son nom) donnera la possibilité de poursuivre les négationnistes du génocide des Tutsi au Rwanda en 1994, génocide qui a fait, pour sa part, l’objet d’un jugement international. Mazeltov à nos amis tutsi pour lesquels le CCAF a travaillé avec abnégation et en toute discrétion… Le Collectif VAN analyse ci-dessous le vote du 14 octobre 2016 et reproduit les éléments d’information en ligne sur le site du Sénat.
Rappel des faits :

Le scrutin n°31 de la séance du vendredi 14 octobre 2016 au Sénat, portait sur le vote des amendements n°330 et 455 rectifié ter visant à rétablir l’article 38 ter du projet de loi Égalité et Citoyenneté, adopté par l’Assemblée nationale, article qui avait été supprimé par la Commission des lois du Sénat. Les deux amendements demandaient le rétablissement des dispositions qui permettaient la création d’un délit de « négation, minoration ou banalisation » des crimes de génocide et d’autres crimes contre l’humanité.

Christian Favier et les membres du groupe communiste, auteurs de l’amendement n°330, ont tenu à souligner dans l’objet de leur texte que ces dispositions (votées à l’Assemblée nationale en juillet dernier) avaient été saluées « comme une grande avancée notamment concernant la reconnaissance du génocide arménien suite à la censure de la loi reconnaissant le génocide arménien par le conseil constitutionnel. »
L’amendement 455 rectifié ter était pour sa part porté par Didier Guillaume et ses collègues du groupe socialiste.

Sur 333 votants et 302 suffrages exprimés, 156 se sont prononcés en faveur du rétablissement de cet amendement et 146 s’y sont opposés. Le texte a donc été adopté avec une très courte majorité de 10 voix. Une analyse des votes fait apparaître pour la première fois un net clivage gauche/droite sur cette thématique qui d’ordinaire réunit des soutiens ou des opposants de manière transversale et non-partisane. À n’en pas douter, le fait que cette loi ait été portée par le gouvernement et non par des députés a entrainé des jeux politiciens entre le pouvoir et l’opposition, majoritaire au Sénat.

Ainsi, sur les 146 votes négatifs qui se sont exprimés à l’encontre de cet article, 110 votes proviennent du Groupe Les Républicains. Seuls 12 sénateurs LR (dont Hubert Falco, Jean-Claude Gaudin, et Roger Karoutchi) ont voté le rétablissement de l’amendement. Un seul groupe a voté Oui à l’unanimité, c’est le groupe communiste qui portait justement l’amendement n°330. Un autre s’est totalement abstenu, c’est le groupe écologiste. Ce qui est un progrès si l’on se remémore le combat de ce groupe contre la Loi Boyer en 2012, loi alors brocardée au Sénat par Esther Benbassa.

Notons aussi l’étonnant vote « Pour » de Nathalie Goulet (UDI), pourtant ardente supporter de l’Azerbaïdjan, un État négationniste allié de la Turquie et qui mène un lobbying intense contre les Arméniens en les accusant de génocide (ce que Nathalie Goulet fait également sans néanmoins nier le génocide arménien).
Sauf erreur, tous les autres élus réputés pour leurs relations complaisantes envers l’Azerbaïdjan, ont voté contre cet amendement ou se sont abstenus.

Par ailleurs, le Groupe UDI – qui comporte des élus tels que Sophie Joissains et Hervé Marseille connus pour leurs prises de position en faveur de la pénalisation du négationnisme du génocide arménien – apparaît très divisé puisque 17 sénateurs ont voté en faveur de cet amendement et 20 s’y sont opposés.

Le groupe socialiste a voté Oui dans sa presque totalité (avec les élus engagés sur cette question depuis de nombreuses années, tels Luc Carvounas, Gérard Collomb et Philippe Kaltenbach), les 5 voix manquantes étant celles d’abstentionnistes parmi lesquels on ne s’étonnera pas de retrouver Catherine Tasca et Jean-Pierre Le Sueur.

Pour leur part, les sénateurs du FN n’ont pas pris part au vote, ce qui n’est pas pour nous déplaire.

Comme nous l’avions noté lors du vote de ce texte à l’Assemblée nationale en juillet 2016, nous restons perplexes sur l’efficacité future de l’amendement réintroduit dans la loi, puisque les négationnistes ne pourront être poursuivis que si le crime nié a donné lieu à une condamnation prononcée par une juridiction française ou internationale (ce qui n’est pas le cas du génocide arménien), ou si « la négation, la minoration ou la banalisation de ce crime constitue une incitation à la violence ou à la haine à l’égard d’un groupe de personnes ou d’un membre d’un tel groupe défini par référence à la prétendue race, la couleur, la religion, l’ascendance ou l’origine nationale ». On le sait, la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) dans son arrêt Perinçek, et le Conseil Constitutionnel, en réponse à la QPC contre la Loi Gayssot, ont établi un distinguo entre la négation de la Shoah – qui comporterait de facto, selon ces juridictions, une dimension haineuse – et la négation du génocide arménien qui ne comporterait pas cette dimension qu’il faudrait donc prouver à chaque procès. La Loi dite « Égalité » et Citoyenneté s’aligne donc sur ce principe inégal.

Les associations qui se porteront partie civile contre des négationnistes auront la lourde responsabilité de s’assurer en amont de la faisabilité des actions qu’elles intenteront pour gagner leurs procès (y compris en cas de recours de l’accusé devant la CEDH) afin de ne pas engendrer des jurisprudences encore plus restrictives.

N’oublions pas que s’il s’avérait qu’un juge français tranche en notre faveur en décrétant que nier le génocide arménien est de facto un acte de haine, il y a fort à parier que l’accusé porterait ensuite l’affaire devant la CEDH : comment cette juridiction pourrait-elle alors se dédire de sa propre position dans l’affaire Perinçek ?

Certains argueront qu’il sera possible de remporter des procès contre les ultra-nationalistes qui insultent ou menacent les Arméniens dans des manifestations ou sur les réseaux sociaux. Certes, mais la loi promise par François Hollande devait-elle viser exclusivement les analphabètes injurieux que l’on pouvait déjà poursuivre avec l’arsenal juridique existant ? Ne devions-nous pas tordre le cou à une rhétorique négationniste très construite qui se propage sur internet et qui est le fait d’auteurs se présentant avec le masque de l’historien ?

Une chose est sûre, l’État turc semble ne pas se faire trop de souci concernant ce texte minimaliste qui permettra au gros gibier négationniste de s’en sortir, s’il bafoue « sans haine » la mémoire des victimes et insulte « sans violence » l’Histoire.

Seule (grande) satisfaction : si le Conseil Constitutionnel n’invalide pas cet article avant sa promulgation, la Loi Égalité et Citoyenneté (qui – en l’occurrence – ne mérite pas son nom) donnera la possibilité de poursuivre les négationnistes du génocide des Tutsi au Rwanda en 1994, génocide qui a fait, pour sa part, l’objet d’un jugement international. Mazeltov à nos amis tutsi pour lesquels le CCAF a travaillé avec abnégation et en toute discrétion…

http://www.rwanda-podium.org/index.php/actualites/politique/309-france-le-senat-vote-la-penalisation-de-la-negation-du-genocide-des-tutsi

Posté le 18/10/2016 par rwandaises.com