Certains pays d’Afrique de l’Est tentent de développer leur propre industrie de confection. Mais l’administration américaine ne l’entend pas de cette oreille.
Quand vient l’heure du ménage de printemps, les Américains se croient parfois généreux en déposant leurs vieux vêtements dans des boîtes de collecte. Ces pull-overs tachés, ces tee-shirts de colonie de vacances et ces shorts démodés serviront bien à quelqu’un dans le besoin, non ?
En réalité, les choses sont un peu plus compliquées. Aux États-Unis, la plupart de ces fripes sont revendues à des entreprises privées par l’Armée du Salut, [l’entreprise sociale] Goodwill et d’autres. Elles sont ensuite expédiées par conteneurs, la plupart du temps vers un pays d’Afrique subsaharienne, où elles alimentent une filière de plusieurs milliards de dollars.
Mais les gouvernements africains en ont assez. Car ce qui est souvent perçu, en Occident, comme de la générosité, les empêche de développer leur propre industrie de confection, expliquent-ils. En mars 2016, quatre pays d’Afrique de l’Est [Rwanda, Kenya, Tanzanie et Ouganda] ont donc décidé d’augmenter leurs droits de douane – en allant parfois jusqu’à les multiplier par 20 – sur les importations de vêtements usagés.
Des pays africains ont cédé à la pression
Le lobby américain du vêtement de seconde main a tiré la sonnette d’alarme, et l’an dernier l’administration Trump a ouvert une enquête pour déterminer si ces quatre pays ne violaient pas un accord commercial vieux de dix-huit ans avec les États-Unis [l’Agoa – African Growth and Opportunity Act – permet à des pays
Menaces sur l’Agoa
La loi sur la croissance et les opportunités de développement en Afrique (African Growth and Opportunies Act, Agoa) a été signée par Bill Clinton en 2000 puis renouvelée pour dix ans par Barack Obama, en 2015. Elle permet d’importer aux États-Unis certains produits d’une quarantaine de pays africains, sans payer de droits de douane. Les pays participants doivent remplir des conditions en matière de droits humains, de bonne gouvernance, de pluralisme politique et de protection des travailleurs. Ils doivent en outre évoluer vers une économie de marché et supprimer progressivement les tarifs douaniers sur les produits américains. Washington estime qu’en taxant les importations de vêtements d’occasion, le Rwanda s’est mis hors jeu. Le 29 mars, le président Trump a ainsi annoncé la suspension, 60 jours plus tard, des avantages commerciaux dont bénéficient les vêtements importés du Rwanda. “Pourtant, en essayant de fabriquer lui-même ses vêtements, le Rwanda fait ce que nous prétendons attendre des pays pauvres : qu’ils se sevrent tous seuls de la charité, commente un éditorialiste du Financial Times. On devrait le laisser essayer.”
https://www.courrierinternational.com/article/economie-le-rwanda-ne-veut-plus-de-nos-vieux-vetements
Posté le 30/06/2018 par rwandaises.com