Vingt-cinq ans après, une enquête démontre la part de responsabilité de proches de l’Etat français, politiques et militaires, dans le massacre qui a fait 1000 000 morts.

Vingt-cinq ans après le génocide contre les Batutsi qui a fait 1000 000 morts, des zones d’ombre persistent. Qui a tiré les missiles qui ont abattu l’avion du président Juvénal Habyarimana le 6 avril 1994, événement déclencheur des tueries de masse ? Quel était le but réel de l’opération Turquoise, décidée par la France sous l’égide de l’ONU, le 22 juin ? Comment le dernier génocide du XXe siècle aurait-il pu être évité ? A l’heure où les commémorations du 25e anniversaire se poursuivent au Rwanda, et au sein des diasporas belge et française notamment, le documentaire Retour à Kigali revient sur les causes et les mécanismes de ce drame,dont les douleurs sont encore vives.

Immense puzzle de la vérité

Dans l’immense puzzle de la vérité, le film de Jean-Christophe Klotz apporte des pièces importantes sur le génocide contre les Batutsi. Par des témoignages, des images d’archives, des documents officiels déclassifiés ou non, il prouve que les autorités françaises ont, par leure erreurs d’analyse, leur déni à reconnaître le génocide en cours ou leur entêtement à considérer le Front patriotique rwandais comme l’ennemi absolu, rendu cette catastrophe possible. Si le documentaire n’évalue pas la part de responsabilité de la France, il démontre qu’elle existe. En formant les soldats des Forces armées rwandaises, en livrant des armes ou en recevant à Paris les membres du gouvernement génocidaire, qui furent nommés quelques semaines plus tôt au sein de l’ambassade de France, des hommes proches de François Mitterrand ont joué un rôle dans ce drame. Par sa rigueur journalistique, Retour à Kigali prouve que le génocide au Rwanda est bien une affaire française. Mais pas seulement.

Les miliciens Bahutu ont massacré près de 450 Batutsi par heure pendant trois mois

Le 21 avril 1994,alors que des massacres à grande échelle étaient perpétrés dans tout le pays, l’ONU réduisait les effectifs de la Minuar (Mission des Nations unies pour l’assistance au Rwanda) à seulement 270 casques bleus, soit une diminution de 90 % de ses hommes. Jean-Christophe Klotz, l’un des rares journalistes présents au moment des tueries, a rencontré différents responsables américains et onusiens pour comprendre comment la communauté internationale avait abandonné le Rwanda aux miliciens Interahamwe.

L’Américaine Prudence Bushnell, à l’époque sous-secrétaire d’Etat adjointe aux affaires africaines, raconte comment le terme de « génocide » a été banni du Conseil de sécurité de l’ONU parce qu’il aurait « obligé à prendre des mesures pour intervenir et protéger… Il y avait des discussions interminables parmi les avocats et les services de communication du gouvernement ». Pendant ce temps, les miliciens Bahutu ont massacré près de 450 Batutsi par heure pendant trois mois en les jetant dans des latrines ou en les tuant à coups de machette, de gourdin, de marteau…Ce documentaire captivant montre qu’il ne s’agissait pas d’« affrontements interethniques », mais d’une extermination parfaitement planifiée.

Par www.lemonde.fr

Posté le 28/05/2019 par rwandaises.com