Africa 2020, s’ouvrira en juin,  pour six mois de créativité et d’échanges imaginés sur le continent africain ou au sein de la diaspora, déclinés en France. Par Karin Tshidimba, La Libre






Dans trois mois, jour pour jour, s’ouvrira Africa 2020, six mois de créativité et d’échanges imaginés sur le continent africain ou au sein de la diaspora, déclinés en France. N’Goné Fall, commissaire générale, est venue présenter l’événement ce samedi à Bruxelles.

Le rendez-vous est fixé dans trois mois. Du 1er juin au 15 décembre, quelque 220 projets, disséminés partout sur le territoire français, serviront de « caisses de résonance » aux réflexions et questionnements de la société civile et académique africaine autour des grands défis du 21e siècle.

Si de nombreux artistes et créateurs africains y prendront leur part, « ce n’est pas un festival et le focus n’est pas uniquement culturel », insiste sa commissaire générale la Sénégalaise N’Goné Fall, invitée ce samedi à Bozar dans le cadre du festival Afropolitan afin de présenter les grandes lignes de l’événement. Durant la saison, il sera avant tout question d’innovations, de technologies, de projets pédagogiques et de transmission de savoirs…

« Il s’agit de regarder le monde d’un point de vue africain »

« Africa 2020 est un projet panafricain et pluridisciplinaire, centré sur l’innovation dans les arts, les sciences, les technologies, l’entrepreneuriat et l’économie. L’éducation sera une question transversale pour le partage et la transmission de savoirs. Cette Saison inédite favorisera les mobilités, mettra à l’honneur les femmes dans tous les secteurs d’activité et ciblera en priorité la jeunesse », détaille l’Institut français, partenaire de l’événement.

« L’Afrique est plus qu’un lieu de divertissement, on ne m’a pas chargée de venir divertir les Français pendant six mois. Le but de cette saison est de regarder et comprendre le monde d’un point de vue africain. On parle de l’expérience et du quotidien d’1,2 milliard de personnes » réparties dans 54 pays, qui interagissent avec le monde qui les entoure. « Les autres habitants de la planète sont confrontés aux mêmes défis » souligne N’Goné Fall. Raison pour laquelle tous les projets proposés sont panafricains et élaborés en partenariat entre France et Afrique.

200 projets seront proposés à travers toute la France sans oublier la Guadeloupe, la Martinique et La Réunion.

L’événement a été développé à l’initiative du président Emmanuel Macron mais le but n’est « ni de régler les différends de certains pays avec la France ni d’assurer le rayonnement de la France en Afrique » insiste N’Goné Fall. Que du contraire. C’est l’Afrique dans sa multiplicité de langues (anglais, portugais, français, etc.) et d’héritages qui se donnera à voir et bâtira des ponts avec 16 ou 17 QG répartis dans toute la France et les DomTom: Cayenne, Fort-de-France, Lyon, Nantes, Marseille, Paris, Reims,… du 1er juin au 15 décembre 2020.

Pour élaborer ce programme aussi dense et diversifié que possible, en évitant les doublons thématiques et les zones oubliées, N’Goné Fall, architecte de formation et commissaire d’exposition, s’est adjoint les connaissances et contacts de quatre têtes pensantes: Sarah Rifky, commissaire d’exposition basée au Caire ; Folakunle Oshun, artiste co-commissaire de la Biennale de Lagos ; l’écrivain camerounais Ntone Edjabe et la commissaire sud-africaine Nontobeko Ntombela.

Ensemble, ils ont déterminé cinq thèmes à explorer: Oralite augmentée qui 
abordera la question des langues, de la diffusion, des réseaux sociaux et des
innovations technologiques; Économie et fabulation qui posera notamment la
question de la redistribution des ressources et de l’émancipation économique –
à qui profite la croissance africaine ?; Archivage d’Histoires imaginaires qui
sondera les liens entre histoires personnelles et Histoire du monde; Fiction et
mouvements (non) autorisés qui abordera la question de la circulation des
personnes, des idées et des biens et la notion de territoire et enfin les Systèmes
de désobéissance qui interrogeront la notion de citoyenneté ainsi que les
consciences et mouvements politiques.

Même si les projets, bâtis en partenariat entre institutions françaises et acteurs
africains, seront attachés à différents QG, certains d’entre eux seront itinérants 
et se déclineront à travers des outils pédagogiques, projections, masterclasses,
ateliers créatifs, hackathons et jeux vidéo. Ce qui, selon le souhait de la
commissaire générale permettra qu’ils soient ensuite présentés en Afrique.
Résidences de création, étape de restitution ou projections de films : les pistes
ne manquent pas.

La programmation précise et les lieux retenus seront dévoilés fin mars sur le site Africa 2020. Une Saison lancée début juin par différents concerts et célébrations avant d’entamer rencontres, débats et réflexions. Deux artistes de premier plan ont été choisis comme marraine et parrain de l’événement : la Béninoise Angélique Kidjo et le Sénégalais Youssou N’Dour dont l’aura rejaillit sur tout le continent.

Franche et directe, N’Goné Fall n’évite pas les questions qui fâchent, notamment concernant le budget. « Le fait que le prochain sommet France-Afrique soit prévu presque au même moment n’aide pas à trouver les financements privés nécessaires : les bailleurs de fonds sont les mêmes pour les deux événements… » reconnaît-elle.

« Six mois ne suffiront pas à éradiquer des siècles de bêtise »

La commissaire générale ne se berce pas davantage d’illusions: « Non, cette saison ne suffira pas à faire disparaître l’ignorance crasse de certains. Six mois ne suffisent pas à éradiquer des siècles de bêtise. L’Afrique aide la France en lui offrant un corpus de connaissances pour que les futures générations soient mieux informées, ou moins idiotes si vous préférez, sur ce qui s’y passe et se développe. » L’objectif est clair: faire tomber les clichés concernant l’Afrique même si « de nombreuses thématiques resteront à creuser et à explorer au-delà du mois de décembre 2020. » Ce qui pourra notamment se faire grâce aux outils pédagogiques développés, en collaboration avec l’Education nationale et l’Unesco, afin de favoriser un meilleur enseignement de l’Histoire collective de l’Afrique.

https://www.rwanda-podium.org/i