(Syfia Grands Lacs/Rd Congo) A Bandundu, les sourds-muets qui savent lire et écrire profitent eux aussi des avantages du téléphone portable : ils utilisent les sms pour communiquer avec leurs proches ou leurs clients. Des messages qui facilitent leur intégration sociale et la reconnaissance de leurs compétences.

Une quarantaine de sourds-muets sont réunis à l’Alliance franco-congolaise de la ville de Bandundu, chef-lieu de la province du même nom (nord-est de Kinshasa). Ils doivent élire les membres du Comité directeur des personnes malentendantes, une structure créée pour favoriser le partage mutuel des expériences de leur vie professionnelle. Tous ont un téléphone portable mis sous mode vibreur en main, qu’ils vont utiliser pour participer au vote. « Nous sommes attentifs aux vibrations de nos appareils et réagissons vite par texto », explique Alphonsine Yiemi, qui manipule avec aisance les touches de son téléphone, pour écrire et nous faire lire ce sms.
Le vote lui-même se fait par texto. Les trois candidats au poste de président portent leurs noms sur un dossard. Comme ils savent lire et écrire, chaque sourd-muet rédige le nom du candidat de son choix sur son appareil. « Actuellement, le téléphone est devenu un outil de communication très important pour eux aussi », témoigne Nathan Nkenda, qui passe d’un électeur à l’autre pour noter le nom du candidat choisi. Ces élections de juin dernier sont un bon exemple de l’utilisation du sms par les malentendants qui leur facilite grandement la vie.

Très utile dans les contacts
Nkenda est directeur provincial chargé de la formation au centre des malentendants de Bandundu. C’est un homme d’expérience à qui la mission catholique de Beno fait très confiance. Située à 45 km de la capitale provinciale, cette mission a une école de bonne réputation qui assure depuis de longues années, la formation labiale, phonétique et professionnelle des sourds-muets. Nkenda recrute des candidats pour elle, accueille et encadre ceux qui en sortent et qui exercent les petits métiers qu’ils y ont appris : la coupe et couture et la cordonnerie notamment. C’est lui qui, en juin 2010, a pris l’initiative de leur apprendre à utiliser et à communiquer par sms.
Aujourd’hui, ils sont fiers de pouvoir tirer bénéfice de cette nouvelle technologie dans leur vie courante. Couturière, Caroline Baloko a notamment fait du téléphone son principal outil de contact avec ses clients, nombreux à fréquenter son atelier de l’avenue Bakali, dans la commune de Disasi. « Quand elle voit arriver une cliente, elle rédige rapidement un texto de bienvenue qu’elle lui fait lire avec sourire », raconte Christine Mimbulu, qui fait coudre ses vêtements chez elle. Le prix du travail est ensuite négocié et fixé à l’aide de la calculette de l’appareil, tout comme la date du retrait de l’habit. « Souvent le respect du délai convenu est respecté. Dans le cas contraire, elle vous envoie un sms vous fixant une autre date, tout en s’excusant… »
Alphonsine, elle, reçoit de plus en plus de clients, surtout à l’approche de grandes fêtes. « Je couds jour et nuit pendant cette période et je fais des recettes de 150 à 200 $ par semaine », se flatte-t-elle. En 2008, elle avait même concouru à l’élection Miss et avait été élue pour représenter sa province au concours national à Kinshasa. Mais à cause de son handicap, le jury avait préféré choisir sa dauphine, ce qui avait soulevé une vague de protestations dans la ville. Retournée depuis à son atelier de couture, elle a recruté six apprenties formées à Beno, pour faire avancer sa petite entreprise.

« On a perdu du temps »
En lieu et place des gestes qu’ils utilisaient couramment et que nombre de gens ne savent pas interpréter, ces malentendants s’habituent aux sms. « Ils ont toujours la main sur le sac qui contient le téléphone pour sentir les vibrations qui annoncent l’arrivée d’un message, indique Da Makiamfu, président provincial du réseau des personnes vivant avec handicap. Ils peuvent même biper, mais ne le font pas souvent par crainte de perdre des unités si le correspondant décroche, car ils ne peuvent pas écouter la sonnerie. »
Bien connu des habitants du quartier Nsele qui viennent moudre du manioc, du maïs ou du café dans son moulin, Guy Tamufi mène, lui aussi, une vie épanouie dans son milieu. « Par téléphone, nous tenons régulièrement des réunions familiales avec les parents et frères vivant à Kinshasa ou en Europe », témoigne-t-il. Tout récemment, il a retiré un peu d’argent en banque envoyé de Kinshasa, après avoir reçu le petit code secret de transfert sur son téléphone. « Aussitôt, je me suis rendu à l’agence et j’étais servi », se réjouit-il, regrettant d’avoir perdu beaucoup de temps, sans savoir que malgré leur handicap, « nous pouvions utiliser les nouvelles technol

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