(Syfia Grands Lacs/Rwanda) Regrouper plusieurs commerces dans une même boutique satisfait tout le monde : les commerçants qui partagent le coût du loyer et des frais, les clients qui y trouvent des produits variés, les propriétaires qui louent plus facilement leurs magasins… Au Rwanda, cette solution se répand, surtout à Kigali.

Partager l’espace dans les magasins entre plusieurs commerces est devenu courant à Kigali et dans les grandes villes rwandaises. Ainsi, cette grande boutique de la capitale, est, par exemple, divisée en plus de 100 chambrettes où se vendent toutes sortes de produits : habits, chaussures, cosmétiques, restaurants… Tandis que Djaludi cherche à attirer les clients en murmurant aux filles qui passent « Veux-tu des habits de bon style ? Jupes, pantalons et des chemises au top », Rosette Mutegarugori, dans l’attente de clients, explique : « Ces deux côtés m’appartiennent, mais le reste est à lui. » Avec son co-vendeur, elle partage la patente annuelle (20 000 Frw – 35 $), la location (50 000 Frw – 90 $) et l’impôt mensuel du secteur (5 000 Frw – 9 $).

Loyers trop chers
Ces derniers temps, le loyer des magasins ne cesse de monter, car de nombreuses personnes se lancent dans le commerce. Lors des reconstructions des villes, certains bâtiments sont détruits pour en construire de nouveaux, mais en attendant les marchands se regroupent dans d’autres boutiques. Le loyer d’une petite pièce varie entre 50 000 Frw et 100 000 Frw (90 et 180 $) par mois. Les grands magasins de Kigali payent jusqu’à 500 000 Frw (900 $) et plus. « Il n’est plus temps d’être fier de s’asseoir dans les grands magasins qu’on paye cher sans toutefois exploiter tout leur espace », affirme Fidélie qui propose différents services sur ordinateur et vend de la petite papeterie. Elle héberge aussi un petit studio photo, un studio de musique, un service de photocopies et un dépôt de tapis. Ils lui payent plus de la moitié de son loyer mensuel et partagent les frais : taxes, patente, électricité…
Des patrons qui voient que leurs magasins ne leur procurent pas les revenus attendus préfèrent les diviser en petites pièces dont le coût est accessible aux locataires. « En divisant en deux cette salle qui avait manqué de clients depuis six mois, il héberge actuellement un salon de coiffure et un studio, qui lui payent chacun 30 000 Frw par mois (55 $) », confie un employé d’un salon de coiffure de Muhanga. Comme l’explique un technicien en construction de ce district, ces transformations, qui ne changent pas le plan de la maison, ne sont pas interdites. Au contraire, explique Jean Paul, percepteur du secteur Nyamabuye, « cela renfloue nos caisses parce que, à chaque nouvelle salle, nous percevons la patente et des impôts. »

Clients satisfaits
Dans certaines villes de province, les gens continuent à vouloir travailler seuls sans savoir s’ils y gagnent ou y perdent. Certains imitent ce qu’ils ont vu marcher chez le voisin, ce qui fait que plusieurs magasins vendent les mêmes produits dans les mêmes rues, comme le dit cette marchande de Muhanga : « Ici les gens sont égoïstes et jaloux les uns des autres. Tu mets un café Internet ici et d’autres t’entourent vite, même chose pour les alimentations, les magasins d’habillement… ».
À Kigali, où les activités sont plus nombreuses qu’en province, ce système se répand : une salle peut héberger café Internet, maison de consultance, studio, commerce de téléphones mobiles, salon de couture, papeterie….
Travailler ensemble en un même lieu nécessite de se faire confiance : cela crée une solidarité afin qu’aucun client ne sorte sans acheter. Dans un grand salon de couture Mukankusi Généreuse témoigne que, quand un de ses clients arrive et qu’elle a trop à faire, elle l’envoie à une de ses collègues : « Nous avons plus de 10 ans ensemble et je connais leur professionnalisme : cet argent ne doit pas quitter notre salon », explique-t-elle.
Les clients aussi apprécient ces regroupements. Urayenezan Marie, de Kigali, ne cache pas sa satisfaction : « Ce sont comme des supermarchés : on y trouve tout. Et quand un produit manque ici, on t’envoie de l’autre côté du magasin. Contrairement aux supermarchés, ici les prix sont négociables ». Et, ajoute-t-elle, on n’est pas exposé aux bandits qui rôdent autour des clients. Cela rend bien service : « Quand on ne trouve pas quelque chose, on t’indique un autre magasin, sans que tu aies besoin de demander aux passants », confirme Ingabire Clémence, enceinte, en train de chercher les habits pour le bébé.

 
 
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Posté par rwandaises.com