Le génocide des Tutsi du Rwanda a été plusieurs fois prononcé par les autorités politiques Rwandaises depuis 1963 dans le discours de l’ancien Président Grégoire Kayibanda.
Le génocide des Tutsi du Rwanda a été prononcé par le Président Juvénal Habyarimana le 30 octobre 1990. Juste avant que le FPR ne commence la guérilla, le Président Habyarimana dans son discours a dit qu’il vengera ses hommes. Venger ses hommes qui sont morts au front. Sur qui allait-il les venger ? Sur des innocents. Le Kinyarwanda étant une langue pleine de métaphores, nous avons été sans doute les seuls à comprendre.
Cela a commencé par les massacres des Tutsi de Byumba organisé par le pouvoir Habyarimana, dès l’attaque du FPR en octobre 1990. Ceux-ci été suivis par le massacre des Bagogwe en 1991 et 1992, dont on ne parle même pas car ils ne sont pas concernés par la justice de l’ONU.
Au 5 octobre 1990, vous vous souviendrez des milliers de Tutsi qui ont été arrêtés jusqu’aux étudiants dans les écoles. À Nyamirambo, les personnes ont été arrêtées, torturées, parquées dans le stade régional, ils y mangeaient de l’herbe. Nos familles ont mangé de l’herbe pour survivre à ces arrestations arbitraires. J’ai difficile à l’oublier.
Les nôtres ont tous fini leur voyage en prison 1930 (une prison surnommée 1930 car elle a été construite par le Belgique en 1930). Combien en sont revenus ? Je voudrais demander à l’ONU si elle n’était pas là.
Souvenez-vous de HRW chez un des Bourgmestres du Nord, Kajerijeri, lorsqu’on a trouvé une fosse commune dans son jardin ! L’ONU l’a oublié ? Moi pas.
Ceux qui étaient au Rwanda se souviendront bien quand les bus acheminaient les armes, dont les machettes, dans différents coins du Rwanda depuis 1993. Nous étions là. Nous avons vu et nous avons dénoncé. L’ONU a décidé que les armes trouvées soient rendues au pouvoir qui planifiait le génocide des Tutsi. Aujourd’hui, les experts du Rwanda disent que le TPIR n’a pas encore prouvé la planification du génocide des Tutsi du Rwanda. Pas de planification, donc pas de génocide ? C’est cela ? Plutôt des massacres interethniques ? Les massacres à grande échelle comme disent les génocidaires et ces massacres sont à la responsabilité du front patriotique ? Le seul qui a pu arrêter le génocide. Ceci était typique de l’accusation en miroir par les génocidaires. Un rapport des renseignements belges, Études sur les milices Interahamwe, indiquait dès le 2 février 1994 que celles-ci avaient reçu comme mission de localiser toutes les familles Tutsi. Qui dit liste, dit planification. Qui dit planification, dit entente en vue de commettre.
Je vois où veut en venir l’ONU. L’ONU veut un jour nier le génocide. Les actes de l’ONU montrent bien sa négation de notre génocide. L’ONU veut montrer qu’il n’y a jamais eu de planification du génocide des Tutsi. Pas de planification égale pas de génocide. Je vous mets en garde, vous les Nations Unies. Quand il n’y a pas de justice, c’est la naissance des justiciers. L’ONU est à l’origine des conflits dans le monde car l’ONU est incapable de juger les coupables. Si les rescapés du génocide des Tutsi commençaient à faire leur propre justice, tout le monde dirait que c’est de la vengeance. Cela fait 15 ans que nous attendons la justice, cela fait 15 ans que les rescapés sont tués encore et encore ou qu’ils meurent des suites du génocide, comme les femmes violées qui meurent encore du Sida. L’ONU a commencé par soigner leurs violeurs sans voir les violées. Combien de rescapés ont été tués par les familles des prisonniers ou leurs amis après avoir témoigné à Arusha ? Combien de fois avons-nous été traitées de personnes manipulées par le pouvoir pour ne pas aller témoigner dans ce tribunal ? Pourtant l’État Rwandais actuel a toujours collaboré avec ce tribunal.
Aujourd’hui on lâche un des cerveaux du génocide, Protais Zigiranyirazo que nous n’osions même pas prononcer le nom tellement il nous faisait peur et que nous avons surnommé Monsieur Z. Il paraît que c’est pour vice de procédure et Dieu sait que ce n’est pas le premier. Le TPIR vient de lâcher aussi un prêtre, le Père Hormisdas Nsengimana en même temps que Monsieur Z. Si Hormisdas Nsengimana est innocent, tous les prêtres le sont ! C’est ahurissant.
Les plus importants des planificateurs du génocide sont en liberté dans les pays ayant signé la convention de Genève. Où allons-nous ? Et pour nous mettre la poudre aux yeux, on arrête en même temps les responsables du FDLR que l’on va relâcher le lendemain. Pour nous donner un coup de plus, Monsieur Pierre Péan, un écrivain Français, vient de gagner en France son procès en appel, pour avoir écrit que les Tutsi reçoivent une éducation au mensonge depuis leur naissance. On donne raison aux génocidaires et aux négationnistes de tous les côtés et ce n’est pas n’importe qui qui accrédite leur crime : C’est chaque fois, l’ONU ou la France. En voyant comment Monsieur Pierre Péan peint les enfants Tutsi, les génocidaires ont eu raison de les massacrer car ils étaient un danger pour l’humanité. Pourquoi ?
Nous sommes fatigués. Nous sommes très fatigués. Mais je vous assure, vous les responsables de l’ONU, qu’il reste un ou mille rescapés, nous ne sommes pas prêts d’arrêter. Vous vous dites sans doute que puisque nous sommes seuls et abandonnés par vous et le monde, la solution sera biologique. Nous vieillirons, nous sommes malades, nous mourons et la solution sera trouvée. Vous vous trompez, nous continuerons.
Parfois je pleure quand je vois à quel point les Nations unies torturent les rescapés Tutsi. Les Nations unies ont très vite oublié que pour juger la Shoah, elles n’a pas fait venir les rescapés d’Auschwitz pour témoigner aux procès de Nuremberg.
J’ai perdu tout jusqu’à moi-même puisque mes enfants ont été massacrés et jetés dans la fosse commune comme de la saleté, car le génocide, à part s’appeler le travail, on l‘appelait aussi un nettoyage. Mes enfants étaient une saleté au Rwanda. J’ai perdu mon mari et tout ce qui illuminait ma vie, je ne suis pas prête à baisser les bras, tuez-moi au lieu de me torturer. Tuez-nous puisque vous le voulez ainsi, mais arrêtez. Mettez nos orphelins et nos veuves en prison à Arusha à la place des génocidaires car nous sommes coupables d’avoir subi un génocide. Au moins, nous pourrons manger trois fois par jour. Au moins nous aurons un abri. Au moins, nous serons soignés, nous les rescapés du génocide. Vous n’êtes pas capables ? Alors tuez-nous et vous avez fini le travail. Comment expliquer qu’un tribunal qui a toujours reçu plus de cent millions de dollars de budgets par an, plus de 267 millions rien qu’en 2008, ne nous fasse pas justice. Un tribunal, qui depuis sa création en 1995 n’a terminé que 30 procès, pour plus d’un million de victimes de ce génocide en trois mois.
La justice d’Arusha n’est pas une justice pour nous, Nations Unies. C’est pour vous. Ce tribunal a été créé pour vous donner bonne conscience. Une justice qui ne répare pas. Une justice qui nous a refusé d’être parties civiles et nous considère uniquement comme témoins. Nous sommes défendus pas un procureur que nous n’avons pas choisi, lorsque les assassins des nôtres ont plusieurs avocats. Un tribunal qui nous demande de prendre l’avion pour aller dans un autre pays pour témoigner de ce que nous avons subi. Mais surtout une justice qui n’a prévu aucune réparation pour les victimes. Quelle sorte de justice pensez-vous nous faire ?
Une justice qui ne répare pas pour les victimes est une injustice de plus.
Excusez ma colère, elle ne peut égaler, ni celle des génocidaires face à l’innocence de leurs victimes, ni égaler mon chagrin de mère face à ce que mes enfants ont subi.
Nos ancêtres disent que nul ne fait procès à celui qui l’enterre. Mais ils disent aussi pour rester positifs : Quel que soit la longueur de la nuit, le jour finit par apparaître.
Fait à Bruxelles le 18 novembre 2009
Signé Yolande Mukagasana
Rescapée du génocide(archives rwandaises)
http://www.nyamirambo.org/
Posté par rwandaises.com