Lors de sa première conférence de presse de l’année 2012, le président Paul Kagame a abordé plusieurs sujets dont notamment la récente mise en résidence surveillée de quatre hauts gradés de l’armée rwandaise.
Paul Kagame s’est entretenu jeudi matin avec des journalistes des médias rwandais et étrangers à Kigali pour la première fois depuis le début de l’année. Le chef de l’Etat a longuement répondu aux questions des journalistes. Différents thèmes ont été abordés: sécurité, politique, social, justice notamment.
Le président de la République a commencé sa conférence de presse par une mise au point sur la situation des quatre hauts gradés des Forces rwandaises de défense, suspendus de leurs fonctions récemment au sein, puis mis en résidence surveillée (Lt Gen Fred Ibingira, Brig Gen Richard Rutatina, Brig Gen Wilson Gumisiriza et Col Dan Munyuza). « Ces officiers supérieurs ont été suspendus pour indiscipline. Ils poursuivaient des activités qui étaient en dehors du cadre militaire », a indiqué le chef de l’Etat. Le président a précisé que beaucoup de rumeurs circulaient à propos de ces arrestations. « C’est à vous de choisir entre la vérité et la rumeur. » Pour mémoire, selon le porte-parole des Forces rwandaises de défense, le colonel Joseph Nzabamwita, les quatre hommes seraient impliqués dans un trafic illégal de minerais avec des civils congolais.
Répondant au journaliste qui lui posait une question sur un possible coup d’Etat dans le pays, le président a exclu la probabilité qu’un tel fait puisse se produire au Rwanda. « Vous savez, pendant la campagne électorale de 2010, j’ai beaucoup voyagé au Rwanda. J’ai rencontré beaucoup de gens. J’ai beaucoup discuté. Et j’ai compris que les Rwandais étaient mûrs et ne pouvaient plus permettre qu’une telle chose arrive. »
Paul Kagame a également abordé des questions internationales. Il a déclaré qu’il fallait « user de tous les moyens et de toutes les ressources dont nous disposons pour parvenir à réduire notre dépendance ». Commentant le nouveau bâtiment offert par la Chine (photo ci-contre), qui abrite désormais le siège de l’Union africaine (UA), construit et entièrement financé par Pékin, le président a estimé que le but allait être « de se donner les moyens de nous en sortir par nous-mêmes à l’avenir. Combien de temps cela prendra-t-il? C’est la question. » A propos du manque d’efficacité de l’UA dans le réglement des conflits, Paul Kagame a préféré insister sur la bonne gouvernance. « Nous devons bien faire dans nos propres pays pour éviter que des éléments extérieurs se sentent l’obligation d’intervenir. »
En évoquant le rapport des experts en balistique remis récemment au juge français antiterroriste Marc Trévidic, le chef de l’Etat a déclaré que « les dommages causés par le rapport du juge Bruguière sont trop importants. Il sera difficile de les réparer. » Il a indiqué que « le rapport du juge Marc Trévidic ne fait que confirmer ce qui se savait déjà ». « Le problème est que tout ceci nous prend du temps et coûte cher. Nous avons besoin de passer à autre chose », a-t-il conclu.
Il est également revenu sur les mandats d’arrêt internationaux émis il y a quelque temps par un juge espagnol. Quarante personnalités parmi ses proches sont visées. « Les mandats d’arrêt espagnols sont encore plus confus que ceux du juge Bruguière. Eux considèrent même que la naissance du FPR est un crime. Ils sont faits pour des raisons politiques motivées par une envie de nuire au Rwanda et aux Rwandais. » « Ces mandats sont sans fondement. Nous l’avons dit et nous souhaitons que ceci soit réglé plus tôt que tard », a-t-il insisté.
Le président s’est réjoui de la récente extradition de Léon Mugesera, professeur à l’Université canadienne de Laval accusé d’incitation au génocide entre autres. « La décision a mis du temps à venir, mais c’est bien que tout ce soit terminer ainsi. Les procès de suspects rwandais devraient impérativement avoir lieu au Rwanda, car il en va du droit fondamental des Rwandais. Je n’ai aucun doute que notre justice ménera à bien ces jugements et de la manière la plus juste. »
Toujours sur le plan extérieur, Paul Kagame a assuré qu’il voyait, lui, des signes de faiblesse au sein des FDLR (Forces démocratiques pour la libération du Rwanda, rebellion rwandaise basée à l’Est de la République démocratique du Congo). « Nous continuons à en discuter avec les parties prenantes », a-t-il indiqué.
Le chef de l’Etat a longuement abordé l’intégration est-africaine en cours. « Ce n’est pas facile comme nous le pensions, et cela ne peut pas aller aussi vite que nous le souhaitions. Mais nous avons déjà réalisé certaines choses. Comme l’harmonisation graduelle des droits de douane, la mise en place de l’Assemblée législative est-africaine. Nous allons continuer dans ce sens. »
Le président de la République est aussi revenu sur la relation qu’il entretient avec les Rwandais. « Je rencontre beaucoup de gens. On discute, ils me posent des questions et je leur donne des réponses. Ils m’écrivent et je leur répond », a confié le président.
Paul Kagame a encouragé les responsables locaux (Maires, Exécutifs et autres) à « rester ambitieux et engagés pour accomplir les buts auxquels vous vous êtes engagés car ça marche quand c’est bien conduit ».
Le chef de l’Etat a également mis en avant sa vision de l’environnement. « Nous subissons une pression démographique importante mais nous prenons des mesures. Nous menons des campagnes de sensibilisation sur l’environnement, sur le contrôle des naissances, etc. »
A propos du procès de deux journalistes, Saidath Mukakibibi et Agnès Nkusi, jugées en appel pour diffamation, incitation à la désobéissance et minimisation du génocide, le chef de l’Etat a voulu prendre ses distances: « Je ne suis pas juge et je n’ai aucune influence sur les décisions de la justice. Je peux donner mon opinion mais pas le verdict. »
A propos des taxes appliquées sur les véhicules importés d’Europe, le président de la République a récusé, par le biais de son ministre des Finances John Rwangombwa (photo), toute augmentation de la taxe. « Nous appliquons les mêmes que partout ailleurs », a répliqué le ministre. Les Rwandais sont de plus en plus obligés de faire venir des véhicules des pays voisins (Ouganda, Tanzanie, princiepalement) et se les voient confisquer par les autorités qui n’en veulent pas, se plaignent certains. Or faire venir une voiture d’Europe coûte relativement cher à cause du montant élevé des taxes, disent-ils.
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Eric Kalisa
Ph.D. Candidate ABD,
Degree of doctor of philosophy
University of Toronto
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Toronto ON M5S 1J4
eric.kalisa@utoronto.ca, kalisa_eric@yahoo.ca
289-775-2236 (Cell.)
Posté par rwandaises.com