Crash:Camer.be

La République démocratique du Congo (RDC) a connu son premier accident d’avion de la nouvelle année, le 12 février 2012 à Bukavu, à la frontière avec le Rwanda. Ce jour-là, un jet ratait son atterrissage à l’aéroport de cette ville et tuait 5 personnes dont Augustin Katumba Mwanke, conseiller spécial du chef de l’Etat. Au nombre des blessés, figurent le ministre des Finances et le gouverneur du Sud-Kivu. Cet accident, un de plus, serait-on tenté de dire, endeuille profondément la République pour avoir touché un proche du chef de l’Etat. Mais, par-dessus tout, il vient poser à nouveau et avec acuité le problème de la sécurité de la navigation aérienne en RD Congo.

Comme toujours en pareille circonstance, on se demande ce qui a bien pu être à l’origine de ce drame : une erreur humaine ou une défaillance mécanique ? Déjà, la cause humaine est privilégiée. Toutefois, il faut bien aller au-delà. Il y a tout un faisceau de facteurs qui sont à l’origine des crashes à répétition en RD Congo, ce vaste pays où l’avion demeure le moyen de transport indispensable, faute d’un réseau routier développé. Les longues distances conjuguées au mauvais état des routes là où elles existent, ont favorisé le développement de compagnies aériennes privées pour assurer le transport domestique. Malheureusement, beaucoup de promoteurs n’ont d’yeux que pour le profit qu’ils peuvent réaliser et font peu cas de la sécurité de leurs appareils, de la qualification des pilotes, etc.

En lieu et place d’avions, ils font voler des cercueils et sont prompts à tout mettre sur le dos de Dieu au moindre accident. Pourtant, ils ont une grande part de responsabilité dans les drames à répétition en rusant avec les mesures de sécurité, en se comportant comme des gérants de taxis-brousse qui transportent tout et n’importe quoi souvent au-delà de leurs capacités. L’Etat, qui devrait faire régner l’ordre et la discipline, s’est montré lui aussi défaillant.

Non seulement, la puissance publique laisse voler des avions qui ne répondent pas aux normes (la plupart sont interdits d’accès au ciel européen par exemple), mais aussi elle a laissé se dégrader les installations aéroportuaires qui datent de l’indépendance. Des taxes aéroportuaires sont perçues dans l’optique d’entretenir les infrastructures mais l’on ne voit rien de concret.

Le président de l’Union nationale des pilotes congolais ne croyait pas si bien dire, au lendemain du crash du 12 février, lorsqu’il faisait état de nids de poule au beau milieu de pistes d’atterrissage. Dans le crash qui a touché le cœur de la république, il est question d’absence de balise de guidage dont la présence aurait pu permettre au pilote de poser le jet au bon endroit de la piste. A cela s’ajoutent un contrôle aérien déficient et une météo approximative.

Un véritable pilotage à vue digne des débuts de l’aviation. Le crash du 12 février braque une fois de plus les regards et les projecteurs sur les autorités. Vont-elles enfin prendre conscience du désordre qui règne dans le secteur aérien et des risques en termes de pertes en vies humaines qu’il fait courir à tous les Congolais ?

Au regard de tout ce qui précède, le temps n’est-il pas venu pour le pays de Kabila d’adhérer, comme son voisin de l’autre rive, le Congo-Brazzaville, à l’Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (ASECNA) ? Déjà, l’Etat a retiré la licence à la compagnie qui a affrété le jet. Il faut aller au-delà. Il ne faut plus se contenter de s’émouvoir, de pleurer les morts après chaque catastrophe et attendre la prochaine pour recommencer.

© Le Pays : Séni DABO
Posté par rwandanews