Marie-France Cros

La communauté internationale s’active à renforcer le mandat des casques bleus. Mais ce ne sera pas facile.

Nous n’allons pas nous arrêter à Goma. Nous irons jusqu’à Bukavu (Sud-Kivu voisin), Kisangani (Prov. Orientale voisine)et Kinshasa ! » C’est le défi lancé mercredi matin par le porte-parole militaire du M23, le colonel Vianney Kazarama, au stade des Volcans de Goma, où militaires et policiers étaient invités à se signaler et déposer les armes. Selon l’AFP, certains envisageaient de s’engager dans le M23, espérant « une meilleure solde » que celle qui peinait à parvenir à eux jusqu’ici.

En ville, « la vie reprend petit à petit« , nous a indiqué un habitant, mais « sans eau ni électricité » en raison de destructions causées par les tirs d’artillerie de lundi.

A 11h, mercredi, le M23 a pris Saké (27 km de Goma), sur la route vers Bukavu, où les militaires qui avaient fui Goma s’étaient regroupés, mardi, avant de repartir plus loin – non sans piller la localité.

Aller à Bukavu ? Mercredi, les observateurs considéraient la chose moins impossible que la semaine dernière. « En ce moment, Bukavu est sans défense parce que les militaires qui y étaient déployés ont été envoyés en renfort – trop tard – vers Goma et beaucoup se sont évanouis dans la nature« , nous indique Jean-Jacques Wondo, membre d’un réseau congolais d’anciens de l’ERM (Ecole royale militaire belge) en contact avec des militaires au front.

« Ils visent la chute de la ville sans combat »

Et de noter que « la tactique utilisée par le M23 ressemble étrangement à celle de 1996-97 (NdlR: lors de la chute de Mobutu): annoncer la prochaine ville à conquérir, provoquer une panique généralisée de la population concernée, porter un coup psychologique pour démotiver les FARDC (l’armée congolaise) de sorte qu’ils abandonnent leurs positions et permettent la chute de la ville sans combat. »« Comme en 1996, le Rwanda veut profiter d’une conjonction de circonstances au Congo, qu’elles soient socio-politiques (impopularité de Kabila et situation sociale chaotique), militaires (faiblesse des FARDC et mécontentement dans les rangs, supériorité militaire du M23-armée rwandaise) et diplomatiques (léthargie de la commnauté internationale) », poursuit M. Wondo.

Au niveau diplomatique, l’Ouganda a diffusé mercredi, à l’occasion d’une réunion régionale à Kampala, une déclaration commune des présidents ougandais Museveni, rwandais Kagame et congolais Kabila, exigeant du M23 qu’il « cesse immédiatement son offensive et se retire de Goma ». Ouganda et Rwanda sont accusés de soutenir le M23.

En outre, à New York, la France – appuyée par la Belgique – a demandé un renforcement du mandat de la Monusco (casques bleus au Congo – 17 000 hommes). Le mandat actuel les autorise à utiliser la force pour « protéger les civils », pas « pour casser du M23« , a rappelé le chef des opérations, le Français Hervé Ladsous.

Un renforcement de ce mandat est cependant difficile à obtenir. L’Inde, qui fournit le plus gros contingent de casques bleus au Congo et a combattu ces derniers jours aux côtés de l’armée congolaise contre le M23, a en effet déposé à l’Onu, en acceptant sa mission, des restrictions à l’usage de ses troupes. Le document est secret mais on sait que l’Inde se refuse à « combattre à la place de l’armée congolaise » et a cessé le feu, à Goma, lorsque cette dernière a fui. Ensuite la Monusco n’a pas empêché l’entrée du M23 dans Goma parce qu’elle a eu lieu sans tirer.

Des contacts diplomatiques ont cependant lieu pour que la Monusco, qui coûte à la communauté internationale 1,5 milliard de dollars par an, soit renforcée par des troupes africaines et puisse être chargée de combattre tous les groupes armés au Kivu et pas seulement le M23.

http://www.lalibre.be/actu/international/article/779143/le-m23-vise-maintenant-bukavu.html

Posté par rwandaises