Au Rwanda, la RMC est-elle menacée par le gouvernement ? La toute jeune instance d’autorégulation des médias – dont la création avait été arrachée de haute lutte par les journalistes rwandais et perçue comme l’un des rares progrès en matière de liberté de la presse – risque de perdre l’une de ses attributions essentielles. En cause, un paragraphe d’un projet d’arrêté du Premier ministre sur les attributions de l’instance étatique de régulation des médias (RURA). Selon la RMC, ce projet ouvrirait la voie à une nouvelle mainmise du gouvernement sur la presse.
Selon le projet d’arrêté, la RURA, agence technique traditionnellement en charge de l’attribution des fréquences doit désormais « protéger les intérêts de tous les consommateurs contre des diffusions relatives à la pornographie, la pédophilie, la violence, la discrimination, le divisionnisme ainsi que celles portant atteinte à l’intégrité nationale ».
C’est un retour en arrière, selon Fred Muvunyi, président de la RMC, qui estime que la régulation des contenus journalistiques appartient à l’instance indépendante.
« On remet en cause le mode de régulation des médias parce que cela revient à dire que le gouvernement régule de nouveau les médias. Si l’on sape l’autorégulation, on touche au cœur de la liberté de la presse », a-t-il déclaré.
La RMC demande donc le retrait de ce paragraphe dans le projet d’arrêté.
De son côté, Gonzaga Muganwa, secrétaire exécutif de l’Association rwandaise des journalistes, s’inquiète de l’emploi de termes à la définition vague.
« Par exemple, le document évoque des programmes portant atteinte à l’ ‘intégrité nationale’. Cela pose problème, car qui définit cette notion d’intégrité nationale ? Les critiques d’ordre politique pourraient être considérées comme allant contre l’intégrité nationale », explique-t-il.
Il estime aussi que le paragraphe ajouté récemment dans le texte – pourtant en discussion depuis un an – serait la conséquence du conflit entre la RURA et la RMC autour de la suspension de la BBC.
Du côté du gouvernent, on dément et l’on assure que la RURA a toujours eu, dans ses attributions, une partie de la régulation des contenus et que la RMC interprète mal la loi sur les médias.