Plusieurs ministres ont au moins un grand-parent étranger. Mais en plein débat sur l’identité nationale, peu évoquent leurs origines.

Rama Yade, Nadine Morano, Fadela Amara, Eric Besson, Patrick Devedjian, Nicolas Sarkozy (Audrey Cerdan et Reuters)

Le message du collectif « 24 heures sans nous » est simple : si les descendants d’immigrés s’abstenaient de travailler et de consommer une journée, la France s’arrêterait de tourner.

Quand ils ont lancé l’idée d’une Journée sans immigrés ce 1er mars, on a entendu parler d’engorgement de poubelles faute d’éboueurs, de restaurants en mal de plongeurs ou d’hôpitaux à la peine sans femmes de ménage. Eux disent que les fils d’immigrés sont aussi médecins, réalisateurs, universitaires, experts-comptables. Ils auraient pu dire ministres.

Car le gouvernement est à l’image de la France, où au moins un habitant sur quatre a un grand-parent étranger :

  • Eric Besson est né du Maroc d’une mère d’origine libanaise
  • Nadine Morano est issue d’une famille italienne.
  • Patrick Devedjan est le fils d’un Arménien né en Turquie
  • Fadela Amara est d’ascendance algérienne
  • Rama Yade est native du Sénégal.

Et puis encore Nora Berra, Hubert Falco, Nathalie Kosciusko-Morizet, Pierre Lellouche… sans oublier Nicolas Sarkozy et ses racines hongroises. D’ailleurs, Nadir Dendoune, du collectif « 24 heures sans nous », dit volontiers que son père est arrivé en France « à peine deux ans après le père de Sarko ».

Les ministres mettent peu en avant leurs racines étrangères

Pourtant, malgré le débat sur l’identité nationale, ou le dérapage de Brice Hortefeux à l’été 2009, rares sont les hommes politiques aux racines hors de l’Hexagone qui se sont plaints de stigmatisation xénophobe.

Tout au plus Nadine Morano exhibe-t-elle, façon cache-sexe, son héritage italien lorsqu’on l’accuse de racisme. Ce fut le cas après sa sortie sur les casquettes à l’envers ou lors de cet échange plein de condescendance sur un marché. 

On est donc loin de ces images de 1991 qui montre Harlem Désir, président de SOS Racisme, entouré de Patrick Devedjian et Ladislas Poniatowski. Autour, six autres députés de tous bords (PS, PCF, RPR et UDF) et le commentaire de la journaliste d’Antenne 2 qui égraine :

« Claude Bartolonne, l’Italien ; Jean-Christophe Cambadélis, le Grec ; Ladislas Poniatowski, le Polonais ; Patrick Devedjian, l’Arménien ; François Asensi, l’Espagnol, Julien Dray, le juif algérien ; Etienne Pinte, le Belge ; Nicolas Sarkozy, le Hongrois. »

 

Ce jour-là, ils s’étaient rassemblés pour protester contre le climat délétère qui entourait le débat d’alors sur l’immigration. Alors qu’on parle quotas et charters en France, Etienne Pinte, qui est toujours député UMP, avait dit ceci :

« Si les lois ou les principes dont on a parlé récemment avaient été appliqués à l’époque où j’ai demandé ma naturalisation, eh bien vraisemblablement non seulement je n’aurais pas été Français mais je ne serais pas devenu député. »

Aujourd’hui, c’est tout juste si l’on a entendu Yazid Sabeg, haut commissaire à l’égalité des chances, protester contre le « déversoir » du débat sur l’identité nationale… pour mieux ravaler son chapeau et animer une soirée officielle dans les Vosges quelques semaines plus tard.

Quand Patrick Devedjian se plaignait d’insultes racistes

Alors que Patrick Devedjian, ministre dans ce gouvernement aujourd’hui, racontait en 1991 recevoir « tous les jours des lettres d’insultes, des lettres racistes » qui lui étaient adressées personnellement. A l’époque, voilà ce qu’il disait :

« Si l’on ne désapprouve pas tout le contenu explosif qu’il y a dans cette question de l’immigration, alors on ne sait pas quelle violence on peut attendre. »

A ce gouvernement auquel le fils d’Arménien appartient à présent, le collectif 24 heures sans nous répond par un appel à la mobilisation. Deux formules :

  • une journée de boycott sans travailler ni consommer pour les plus vigoureux
  • un rassemblement entre 12 et 14 heures, devant les grandes mairies de France, pour les autres

Evidemment, peu probable d’y croiser Nicolas Sarkozy ou Patrick Devedjian. Le disagnostic du collectif derrière la journée sans immigrés est pourtant assez peu différent de celui que dressaient les huit députés en 1991.

Pour frapper au plus large, ils ont élargi le rappel au-delà des seuls enfants d’immigrés. Sont conviés aussi tous les « citoyens conscients de l’apport essentiel de l’immigration ».

Photos : Rama Yade, Nadine Morano, Fadela Amara, Eric Besson, Patrick Devedjian, Nicolas Sarkozy (Audrey Cerdan et Reuters)

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Posté par rwandanews.com