Le jeudi 25 février dernier le président Nicolas Sarkozy s’est rendu au Rwanda. C’était la première visite d’un chef de l’Etat français depuis 1994, date du génocide des Tutsis et du massacre des Hutus qui s’y opposèrent.
À l’occasion de cette visite le Président de la République a évoqué de « graves erreurs d’appréciations », des « erreurs politiques » et une certaine « forme d’aveuglement » en parlant de la politique de la France au Rwanda entre 1990 et 1994.

Depuis 1994, ces « erreurs » ont commencé à être décrites et analysées par la Mission d’Information Parlementaire Française de 1998 et précisées par des organisations internationales, des chercheurs, des historiens, des associations de droits de l’homme… Ces travaux font apparaître que les responsabilité s françaises vont au-delà de simples erreurs. Il est indispensable de les préciser et d’en comprendre les causes.

Que s’est-il réellement passé ? De quelle nature juridique ces faits doivent-ils être qualifiés ? S’agit-il de fautes ? Y a-t-il eu des crimes ? Comment les autorités politiques et militaires françaises ont-elles pu soutenir, par des conseils militaires, la fourniture d’armes, et l’engagement direct de troupes, un régime qui avait fait du racisme anti-tutsi un point central de son identité et de son action ? Comment ces mêmes autorités, très bien informées par les coopérants militaires restés sur place après le 6 avril 1994 du démarrage du génocide, ont-elles pu appuyer au sein du Conseil de sécurité la diminution des effectifs militaires des Nations Unies et s’opposer à l’utilisation du mot génocide pendant des semaines ? Comment ont-elles pu continuer à organiser la fourniture d’armes au gouvernement génocidaire ?

Il est essentiel d’apporter des réponses claires à ces questions et de préciser la responsabilité de ces autorités, pour les victimes du génocide, et pour nous tous, qui ne voulons pas qu’une telle tragédie se reproduise. Ce travail de compréhension doit nous conduire à revoir le fonctionnement de nos institutions politiques : l’enjeu est de développer le contrôle de la politique étrangère par nos députés ainsi que le droit de regard et d’interpellation des citoyens, en vue d’obtenir une nouvelle orientation de la politique de la France en Afrique fondée sur le respect de la dignité de tout homme.

Au cours de ce printemps où vont se succéder la 16ème commémoration du génocide le 7 avril, puis le sommet réunissant les chefs d’Etats africains et français à Nice du 30 mai au 1er juin, il est essentiel pour notre pays de faire un nouveau pas en avant dans la compréhension du rôle qu’a joué la France au Rwanda à cette époque.

Pour cela :

– Nous demandons à tous les partis politiques de notre pays de prendre une position publique sur la nécessité de faire ce travail historique et de s’engager en faveur d’une recherche de vérité et de justice.

– Nous demandons aux députés et au gouvernement de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour faire la lumière sur le rôle joué par la France avant, pendant et après le génocide. Comme première étape nous demandons l’ouverture des archives et la levée du secret -défense sur tout ce qui se rapporte à l’action de la France au Rwanda depuis 1975.

– Nous demandons aux autorités politiques et judiciaires de notre pays de tout mettre en œuvre afin que les procédures judiciaires concernant des présumés auteurs ou complices de génocide soient conduites rapidement.

Premiers signataires

Associations: SOS Racisme, Terre des Hommes France, Ligues des Droits de l’Homme, fédération des Bouches du Rhône, Survie, MRAP, CPCR (Collectif des parties civiles pour le Rwanda), Mouvement de la Paix, Gandhi International, Mémorial 98, ACTES (Association de Coopération avec les Territoires africains pour l’Education et la Santé), collectif MISTRAL, Respaix Conscience Musulmane

Personnalités: Jean-Marie Muller, philosophe et écrivain, fondateur du MAN; Olivier Le Cour Grandmaison, Universitaire; Gustave Massiah, économiste, membre fondateur du CEDETIM/IPAM; Eric Fassin, sociologue, enseignant-chercheu r, Ecole normale supérieure; Laure de Vulpian, journaliste à France Culture; Akhenaton, chanteur d’IAM; Keny Arkana


http://www.cadtm.org/Le-silence-doit-cesser-Un-Appel

http://www.survie-paris.org/appel-citoyen-france-rwanda-faire.html

Posté par rwandaises.com